Méliès, Utopia, Comoedia...
Par Patrick Petitjean
Derrière les recours et pressions contre les cinémas indépendants, il y a une vraie bataille économique contre le libéralisme pour la diversité des salles et donc la diversité culturelle.
UGC, parfois allié avec MK2, a multiplié les recours contre des cinémas municipaux ou des cinémas indépendants. Le Méliès à Montreuil est dans la première catégorie. Le Comoedia à Lyon est dans la seconde. Ce dernier est non seulement attaqué devant le tribunal administratif pour l'aide reçue du CNC, mais aussi au pénal pour l'utilisation du nom "Comoedia". A Bordeaux, c'est la municipalité qui menace la survie de l'Utopia à coup de taxes sur les parkings.
Qu'ils soient municipaux, en régie municipale directe comme le Méliès, ou en délégation associative comme le Kosmos à Fontenay-sous-Bois ou le Cin'Hoche à Bagnolet, qu'ils soient privés comme le Vincennes, le Comoedia ou les Utopia, ces salles défendent un même modèle culturel. Ce sont des cinémas avant tout de proximité. Ils sont tous classés "Art et Essai", parfois "recherche" ou "répertoire". Ils ont des objectifs d’animation culturelle, de formation des publics et d’éducation à l’image. Certains, comme le Méliès, le Trianon (Romainville) et le Kosmos, s'adressent particulièrement au jeune public. Ils organisent festivals et manifestations et remplissent une mission de service public : diversité culturelle, diversité des films. Cela passe par la diversité des salles.
En Seine Saint Denis, il y a 20 cinémas, associatifs ou municipaux, avec 35 écrans. Ils ont été créés ou repris par les municipalités dans les années 1980. Avec les changements sociologiques récents, ces cinémas connaissent un développement important : près d'un million d'entrées en 2006.
C'est une épine dans le pied des grands réseaux d'exploitants voulant conquérir toujours plus de parts de marchés. L'opposition entre les cinémas indépendants et UGC est une vraie opposition entre le service public et un libéralisme normalisateur de la culture. Il faut rappeler que le célèbre AGCS (accord général sur les commerces et les services, de l'organisation mondiale du commerce) concerne toute la chaîne cinématographique, de la production à la projection.
Les cinémas d'Art et Essai sont devenus un enjeu économique majeur. Ils le seront de plus en plus avec le prochain avènement de la projection numérique, nécessitant de lourds investissements. C'est dans ce contexte qu'il faut comprendre l'agression d'UGC contre plusieurs salles indépendantes, dont le Méliès.
L'extension du Méliès à 6 salles est une première pour un cinéma municipal. En se positionnant comme "petit multiplexe", en se battant sur le terrain économique, un cinéma "de service public" refuse de se laisser étouffer par les grands circuits cinématographiques.
Tous les cinémas indépendants qui développent le même modèle culturel, qu'ils soient municipaux ou privés, doivent être solidaires et regrouper leurs forces pour résister aux grands circuits.
C'est le sens du soutien des élu-e-s "Avec les Verts – Montreuil Ville Ouverte" au Méliès. Ils avaient présenté un vœu en ce sens au dernier conseil municipal, vœu refusé par le maire qui avait proposé un texte assimilant soutien au Méliès et soutien général à sa politique municipale. La défense du Méliès mérite mieux que les manœuvres politiciennes du maire.
dimanche 9 décembre 2007 à 08:43 :: Culture - Méliès :: rss
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