Le 30 mars, l'élection municipale s'est jouée à seulement 12 voix en faveur de la liste conduite par le maire sortant, Jean-Yves Montus. Distancée au 1er tour de 313 voix la liste d'Anne-Marie Dauga, où figuraient les partis de droite, a effectué une belle remontée au 2e tour. Elle a gagné 329 voix, alors que le maire sortant ne progressait que de 28 voix. La 3e liste « citoyenne, écologiste et de gauche » a reculé de 134 voix entre les deux tours, de 437 à 303.
Au sein du PS local, certains semblent persuadés que cette 3e liste a fait voter pour l'opposition de droite au 2e tour, et préfèrent ainsi pointer du doigt un bouc émissaire « de gauche » plutôt que de rechercher leurs propres responsabilités. Inversement d'ailleurs, cette 3e liste a été accusée d'avoir fait, en se maintenant, le jeu du maire sortant en « empêchant » des reports potentiels de voix vers la liste d'opposition.
Il y a eu une mobilisation pour le 2e tour d'abstentionnistes du 1er, 223 suffrages exprimés supplémentaires. Il est toujours un peu arbitraire d'interpréter les nouveaux votes, encore plus les reports. Il paraît cependant difficile de ne pas voir dans la mobilisation d'abstentionnistes la principale raison de la remontée de la liste « Dauga ». Des reports de la gauche vers la droite, provoqués par un rejet « personnalisé » du maire sortant ont pu exister, mais restent marginaux. La situation de certains bureaux conforte cette vision : dans le bureau n°5, il y a eu 50 suffrages exprimés de plus, la liste « Dauga » en en gagné 57, la liste « Montus » en a perdu 2 et la 3e liste en a perdu 5 seulement.

Les moyens de l'annulation

Selon le maire, qui donne sa propre interprétation sur sa page facebook, 3 moyens ont été soulevés dans le recours, mais le rapporteur public n'a retenu que le 3e :

« - l'application de l'article L 52 1 du Code électoral qui précise "à compter du 1er jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin"
Le rapporteur public n'a pas retenu d'illégalité commise sur ce point.

- l'application de l'article L 49 du code électoral qui précise "à partir de la veille du scrutin à 0 heure, il est interdit de distribuer ou de faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents"
Le rapporteur public n'a pas retenu d'illégalité commise sur ce point.

- l'application de l'article L 48 2 du code électoral qui précise "il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale".
C'est en s'appuyant sur cet article que le rapporteur public a fondé sa demande d'annulation des élections, en particulier sur deux points : l'annonce de la reconstruction du bâtiment des MNS et des équipements publics de Soustons plage et l'annonce des dates du centenaire des arènes. »

Mais avec 12 voix d'écart, tous les prétextes sont bons pour une annulation

Le principal moyen soulevé était celui de la distribution illégale de tracts le samedi matin. Des témoignages (pas franchement convaincants) avaient été recueillis pour être joints au recours. Lors d'élections antérieures, il était légal de continuer à distribuer des tracts la veille d'une élection, à condition qu'ils datent de la veille, pour permette aux autres candidats d'y répondre éventuellement. Un changement qui avait pourtant été fortement rappelé par tous les partis pour 2014.
En complément, une plainte avait été déposée au pénal par la liste « Dauga », qui a donné lieu à une véritable enquête de gendarmerie, avec convocation d'un habitant et d'une élue avec ses enfants (accusés d'être les auteurs de cet acte illégal « abominable »). On peut avoir quelque mal à comprendre la distorsion entre une telle enquête, violente pour des enfants, et la faiblesse des moyens soulevés (du moins dans la présentation faite par le maire).
Si le rapporteur public n'a pas retenu la distribution du tract le samedi, il a retenu des « éléments nouveaux » contenus dans ce tract, même s'il n'a été distribué que le vendredi jusqu'au soir.

12 voix d'écart, cela laisse place au pouvoir d'appréciation des juges, et donc à un jugement marqué par le contexte politique. Le moyen qui subsiste est bien léger. Il ressemble beaucoup à un prétexte, ce qui n'est d'ailleurs pas illégitime, et a souvent existé dans des cas de très faibles écarts.

Il faut donc attendre non seulement le jugement lui-même (d'autant plus qu'un appel est possible qui repousserait une éventuelle nouvelle élection à plusieurs mois), mais ses attendus permettront de clarifier ce qui s'est passé et ce qui est réellement reproché à la liste du maire sortant.

En cas de nouvelles élections, cela pourra difficilement être la simple reproduction de celle de mars dernier. Entre temps, les élections européennes sont passées par là, avec le score du FN (près de 18% à Soustons), la crise du PS landais (la démission de son secrétaire départemental) et l'effondrement national de (toute) la gauche. Certes, les résultats du PS à Soustons (et d'ailleurs dans les villes voisines) sont parmi les meilleurs du département. Mais cela ne suffit pas à gommer la situation nouvelle provoquée par l'annulation et, surtout, le résultat des élections européennes.