En tout cas, il y a de multiples raisons pour que de l'argent public ne soit pas consacré à un tel projet, qui n'a, en réalité, aucune justification d'intérêt général, malgré les discours des porteurs du projet. Toutes ces raisons sont reprises de manière synthétique dans la conclusion de ce billet.
Pourtant, il est question que trois collectivités territoriales accordent chacune 200 000 euros pour soutenir le Biome : le Conseil régional d'Aquitaine (la grande région maintenant), Marsan Agglo (communauté d'agglomération où se situe le site du projet), et aussi le Département des Pyrénées atlantiques. La commune de Castets a déjà versé 10000 euros. De son côté, le Conseil départemental des Landes a inscrit à son budget prévisionnel l'aménagement d'un carrefour pour accéder au site.

Ce billet est le troisième d'une série pour essayer de comprendre les tenants et aboutissants du projet « Le Biome », dont l'ouverture partielle est annoncée à Pouydesseaux pour l'été 2016... en principe.
Dans un premier billet, je m'étais intéressé à l'association « Un cadeau pour la terre », à son projet de maquette de baleine bleue. La maquette devait tourner de par le monde, avant de simplement s'échouer dans la forêt landaise, intégrée au biome.
Dans le deuxième billet, j'étais revenu sur le premier projet de Biome, présenté en 2010 / 2011 à Soustons, et sur les critiques faites au moment de l'enquête publique, notamment par la SEPANSO. On rappellera qu'en 2011 le promoteur du projet présentait son projet comme une « forêt équatoriale », et affirmait que la station de conservation permettra que « le niveau de biodiversité européenne soit multiplié par 100 » (Sud Ouest, 13/01/11). La cohérence se conjugue mal avec les envolées emphatiques, puisque la conservation ne concernait pas les espèces européennes... Dans la présentation pour l'enquête publique, on pouvait lire aussi : « l'ultime rempart contre la disparition définitive d'espèces animales menacées d'extinction ». Tel Zorro...
Ce projet avait voyagé dans les Landes avant de s'arrêter à Pouydesseaux. Entre temps, un volet du Biome s'en était détaché géographiquement pour atterrir à Castets : le « Mémorial de la biodiversité », volet qui était aussi traité dans ce second billet.
Ce troisième billet se penchera sur le projet global, principalement sur le centre zootechnique pour la conservation, et sur les structures financières censées permettre le fonctionnement de l'ensemble.

Le retour du Biome

Après l'échec de Soustons en 2011, pour cause de respect de la loi littoral, le projet avait disparu des radars, avant de resurgir en janvier 2015, avec une présentation au public, dont le journal Sud Ouest du 10 janvier 2015 rend compte :

On y note l'arrivée de la baleine, le fort soutien des politiques. La Fédération des chasseurs des Landes est au cœur du projet : elle met à disposition le terrain avec un bail emphytéotique de 50 000 euros par an. Les deux promoteurs du projet sont issus du centre de soins pour la faune sauvage Alca Torda, qui lui appartient. La FDC40 est une institution câlinée par les politiques de tous bords, et ceci explique sans doute le soutien des politiques au Biome.
On trouve aussi mention de cette présentation sur le site du Biome et sur un site consacré aux zoos.

La Commission départementale de la nature, du paysage et des sites

Entre temps, deux volets du Biome étaient passés 2014 devant cette commission, réunie dans sa formation consacrée à la faune sauvage captive, en juin pour la création de la station zootechnique, et en octobre pour l'ouverture au public d'un parc animalier. Cette commission (consultative) dépend de la Préfecture, et évalue principalement les aspects techniques et administratifs des dossiers qui lui sont soumis, leur conformité avec les réglementations (sanitaires notamment). Elle n'évalue ni l'opportunité politique ni le contenu scientifique proprement dit, ni même la viabilité financière.
Les deux dossiers, qui sont consultables en Préfecture, comporte de nombreux éléments communs. Les 5 missions que se donne Le Biome, y sont réaffirmées. Ce sont les mêmes que dans le dossier de 2011, les mêmes qui sont reprises dans la demande de subvention au Conseil régional. Ce sont :

  • un centre d'élevage spécialisé,
  • un centre de formation et d'expertise,
  • un centre d'accueil pour animaux saisis,
  • un centre de soin et de stabilisation,
  • et un mémorial de la biodiversité.

Les objectifs figurent dans les deux dossiers remis à la commission des sites
Les 6 objectifs :

  • reproduction d'espèces en danger d'extinction
  • création d'un cheptel animal génétiquement pur
  • recherche sur les techniques de reproduction assistée
  • réintroduction et renforcement de certaines populations
  • études génétiques des populations
  • conservation du matériel génétique au sein d'une cryobanque

Ils sont détaillés ci-après :

A priori, cela semble très ambitieux, sérieux. Cela se présente comme une réponse à l'appel de l'UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) pour la protection des espèces les plus menacées. Cependant, la démarche proposée (reproduction en captivité pour obtenir la pureté génétique et comme unique moyen d'empêcher l'extinction) est loin de faire l'unanimité. La SEPANSO l'avait contestée en 2011 lors de l'enquête. Par ailleurs, cette démarche est justifiée dans le texte du Biome par un rejet des méthodes de travail d'autres établissements. A tout le moins, cela nécessiterait une expertise scientifique (impliquant un processus contradictoire) et de ne pas se contenter d'affirmations abruptes. Par ailleurs, quel sont les moyens de réaliser ce programme, tant du point de vue financier qu'humain ? Les bénéfices du parc animalier ne sont pas une solution satisfaisante.

La station zootechnique de conservation par l'élevage

On trouvera ci-après un extrait du comte rendu de la commission du 25 juin 2014 sur la création de la station zootechnique et l'avant-propos du dossier présenté. L'autorisation de création a été accordée à l'unanimité.

On remarque dans cet avant propos, que le Biome sera « un établissement unique en son genre » (toujours l'emphase), et qu'il sera « un complément d'Alca Torda pour les animaux saisis » (toujours l'opacité en réalité sur les liens avec la FDC40 dont Alca Torda est une émanation. J'y reviendrai.
Dans ce passage, c'est la charte de l'environnement qui est invoquée, comme ailleurs l'UICN : « c'est au nom du devoir qui figure dans cette charte, de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement que le Biome souhaite mettre ses connaissances de la captivité et de la reproduction artificielle au service de la conservation de la biodiversité ». Noble ambition, pour 30 à 50 espèces selon les chiffres donnés à la commission des sites. Mais on est dans la stratégie du colibri sans doute.

Voici les espèces annoncées dans le dossier présenté à la commission. Ce sont des petits mammifères, des félins,des primates, des oiseaux pour lesquels les pays d'origine sont incapables de financer la conservation (ce n'est pas vraiment justifié). Elles sont réparties dans deux bâtiments :
Bâtiment A : Diable de Tasmanie, Renard de Darwin, - Chat des sables, Chat-Tigre, l'Ocelot, le Margay, - Tamarin, Lémurien, le Talapoin, - le Kiwi d'Okarito, le Kagou, les Oies naines, le Lori de Tahiti.
Bâtiment B : Binturong, Chevrotin porte musc, Céphalophe bleu – Panthère nébuleuse, Caracal – Cercopithèque de Roloway, Langur de François – Ara à gorge bleue, Penelopides panini, Paon spicifère.
Suit une plus longue liste d'espèces « susceptibles d'être accueillies » à terme. En 2011, le projet annonçait 1200 à 3000 animaux pour 450 espèces. Il a donc été revu très à la baisse, notamment pour les mammifères. Dans un premier temps (la validité de l'autorisation), il faudra se contenter de 30 à 50 espèces.

Selon son site, anticipant l'autorisation d'ouverture, le Biome dit avoir accueilli dès septembre 2013 6 paons psicifères, mais peut-être est-ce Alca Torda qui a servi provisoirement d'accueil ? Des « heureux événements » (naissance en captivité) étaient annoncés dans les deux ans. J'ai sollicité auprès du Biome en novembre 2015 des nouvelles des paons. Mais mon mèl n'a pas eu de réponse.

La stratégie de conservation mise en œuvre par le Biome

Elle est décrite dans le dossier plus global présenté pour l'ouverture au public à la commission d'octobre 2014. Le Biome mettra en place une commission d'élevage et un comité scientifique.
Les objectifs (voir plus haut) sont déclinés sous forme d'articles dans une sorte de charte. L'introduction (p.132 du dossier) insiste sur « l'extrême nécessité de sauver les espèces animales de la disparition et par la conscience que, pour ce faire, les besoins financiers sont immenses ». Il y a toujours l'emphase (l'extrême nécessité) en même temps qu'un lien immédiatement fait avec les enjeux financiers.
L'article 7 (p.136) traite de la « recherche scientifique », c'est-à-dire, selon le texte, de l'analyse génétique des populations, en partenariat avec les institutions travaillant sur ce sujet (pas de nom). Le Biome s'engage à mettre gratuitement ses résultats à disposition, notamment dans le cadre des entretiens de Soustons (Maintenant les entretiens de Castets, mais le dossier de 2011 n'a pas totalement été actualisé) où ils seront présentés : ce sera « un lieu d'échanges et d'informations sur la conservation de la nature et des espèces en danger d'extinction », comparé aux entretiens de Bichat.

Sont ensuite présentés les membres du « comité scientifique » avec leur profil. Il y avait 12 membres en 2011, il y en a 11 en 2014, avec seulement 3 départs et 2 arrivées : stabilité donc. Ce sont des hommes (tous), visiblement assez homogènes du point de vue de l'âge (30-40 ans) et des origines professionnels (liés pour beaucoup à des centres de soins ou des ONG). Peu de scientifiques membres d'institutions académiques. Pas d'institution en tant que telle. On peut remarque que l'équipe du Biome, telle que présentée sur son site est très proche de ce comité scientifique : avec en plus les deux fondateurs (Jérôme Pensu et Enrique Petit) et Pierre Douay, photographe animalier et président de « un cadeau pour la terre » (la baleine)

Le projet Biome – qui n'est pour l'instant qu'un projet sur le papier - s'enracine dans le Centre Alca Torda, où ses promoteurs travaillent. La station zootechnique est dans la continuité d'Alca Toda dont elle représenterait une extension considérable de son objet (l'élevage et pas seulement le soin), revendiquant aussi un approfondissement scientifique. Avec des moyens financiers sans commune mesure en provenance du parc animalier. Une manière de gagner des parts de marché sur les autres centres de soins ?

La partie du Biome ouverte au public

La demande d'autorisation pour l'ouverture au public d'une partie du Biome a été présentée le 8 octobre 2015 devant la commission des sites. Elle a été accordée, à la majorité cette fois. Ci-après un extrait du compte rendu de la commission

Le préambule du dossier, mais c'est la loi du genre dans les textes du Biome regorge de phrases emphatiques. « Cet établissement sera le pilier de la stratégie financière afin d'assurer le financement de la conservation in-situ et ex-situ ». « Le biome reste à ce jour le plus gros projet de conservation qui n'est (sic) jamais été mené à travers le monde et sans doute le plus original ». « L'ensemble des bénéfices générés par la partie ouverte au public sera intégralement réinjecté dans les actions de conservation à travers la fondation d'entreprise Le Biome qui gérera ces fonds ». « En quelques années, le biome a l'ambition de devenir le plus gros contributeurs dans le domaine de la conservation de la biodiversité tant du point de vue financier que du point de vue technique ». Ci-après, la totalité du préambule.

On reste perplexe devant la grandiloquence et le caractère factice des prétentions affichées. Comment des responsables politiques, et la commission, peuvent lire cette prose sans avoir une réaction de bon sens et la rejeter ?

On peut lire encore un peu plus loin dans ce dossier (p.10) : « Cet établissement unique sera ouvert pour une petite partie au public, permettant de générer des fonds réinvestis dans la conservation de la biodiversité ». « Le biome devra être un des remparts contre la disparition définitive d'espèces animales menacées d'extinction en assurant leur reproduction en captivité »

Même si le parc animalier est le volet le plus visible, et mis en avant pour motiver des soutiens, le Biome assure que « la présentation des animaux reste définitivement un moyen et en aucun cas un objectif ». De même, les animaux présentés ne seront pas ceux élevés par la station zootechnique. Dans la demande auprès du Conseil régional, les promoteurs indiquent que, « Pour autant une large communication pédagogique et didactique, permettra une sensibilisation des visiteurs aux problèmes résultants de la disparition de la diversité biologique, aux conséquences de celle-ci, ainsi qu'aux moyens que chacun peut mettre en oeuvre pour y remédier ». Le principal vecteur pédagogique, ce sera la Baleine

La maquette de la baleine bleue

L'arrivée – à confirmer – de la Baleine sur le site du Biome a été un élément décisif pour justifier les demandes de subventions : un produit d'appel jugé crédible pour le tourisme. Elle est ainsi présentée dans la demande au Conseil régional :
« Pour ajouter au caractère surprenant et "événement", le BIOME s'associe au projet de Monsieur Pierre Douay de construire à échelle 1 la réplique de la plus grosse baleine jamais observée par l'homme mesurant 33.60 mètres. Concrètement, cette réplique après avoir été présentée à Paris lors de la Conférence de Paris sur les changements climatiques (COP21 du 30 novembre au 15 décembre 2015), sera installée sur le site du BIOME. Cela permettra d'offrir au public une expérience unique qui sera de pénétrer dans les entrailles de la baleine et d'assister à une expérience sensorielle multimédia pour amplifier la sensibilisation des visiteurs aux menaces pesant sur l'écosystème. »

Pourtant de nombreuses questions subsistent, au-delà de l'absurdité de mettre une maquette de baleine au cœur de la forêt landaise :
Quelle est la situation financière du projet baleine qui devait se faire, en principe, sans subvention publique ? L'investissement initial était de 3 millions d'euros.
A qui appartient la maquette ? A l'association « un cadeau pour la terre » ? Dans ce cas, quelle location sera versée par Le Biome?
La maquette était supposée – dans le projet initial - voyager de par l'Europe, puis de par le monde après la COP21. Combien de temps va-t-elle séjourner dans les Landes ? Qui décidera de ses absences?
La maquette devait être associée à un centre de documentation et autres activités culturelles. Ne reste-t-il que la promesse d'une « expérience sensorielle » dans le ventre de la maquette ? Quelle est la validité « pédagogique réelle » de l'émerveillement et de l'expérience sensorielle ? On est loin du principe « éveiller la curiosité pour faire prendre conscience de la question.
Plus généralement, que subsiste-t-il du projet initial (voir mon billet de blog sur la baleine) ?

La SAS (Société par Actions Simplifiée) Le Biome

Toutes les informations ci-après sont publiques (notamment via societe.com)
La SAS est créée en avril 2011 (donc après l'enquête publique de Soustons) par Jérôme Pensu et Enrique Petit pour porter le projet. Il y a 3700 parts sociales de 10 euros chacune. Jérôme Pensu en a 90% et Enrique Petit 10%. Le siège social est au domicile du PDG, Jérôme Pensu.
Dès l'AG de la SAS le 25.4.13, qui adopte les comptes au 30.9.12, il apparaît qu' il reste moins de 50% du capital social, ce qui devrait conduire à sa dissolution. Mais poursuite de l'activité reste possible, avec obligation de remonter à plus de 50% dans les 3 ans (soit au 30/9/15), ce qui est décidé.

L'AG de la SAS le 3/9/14 constate que la situation financière a continué de se détériorer. Le capital a continué à être dilapidé. Il est décidé de poursuivre l'activité. Il faut noter que cette AG a lieu alors que les dossiers de création et d'ouverture au public ont été soumis à la Commission des sites, qui ne pouvait ignorer cette précarité financière de la SAS.
Mickael Henry entre au capital social, avec 15% des parts. Enrique Petit en a aussi 15%, et il reste 70% pour Jérôme Pensu.
Une décision importante est prise : l'objet de la SAS (article 2 des statuts) est modifié pour pouvoir faire de la sylviculture. Ce qui ne peut que laisser perplexe, même si la raison officielle est la préservation de la biodiversité. Une autre ressource financière potentielle ? Voici ce qu'on peut lire comme 2e alinéa :
« l'exploitation, le développement, l'entretien et la gestion de parcelles boisées, ainsi que l'activité de sylviculture dans son ensemble, ainsi que l'activité de sylviculture dans son ensemble dans le but de garantir la préservation de la biodiversité telle que détaillée ci-dessus » (le 1er alinéa concerne la création d'établissements d'élevage et l'existence d'espaces zoologiques à visiter.
L'ensemble de cet article des statuts est intéressant à lire attentivement, tant il est large. Tous les alinéas sont valables « en France et à l'étranger » : les centres d'élevage, la sylviculture, les fonds de commerce, la gestion foncière et immobilière... On peut télécharger les statuts ici.

Lors de l'AG de la SAS qui se tient le 20.04.15, les comptes sont toujours dans le rouge, et l'endettement a cru dans les comptes arrêtés au 30.9.14. Mikael Henry sort de la SAS et Enrique Petit récupère ses parts. Jérôme Pensu garde ses 70%. Le siège social est transféré à Pouydesseaux en perspective d'un début d'activités. Le compte rendu de cette AG peut être téléchargé ici.

Le coût du Biome, ses visiteurs et son budget prévisionnel

Dans Sud Ouest du 30.3.2011, l'investissement était estimé à 15 millions d'euros pour ouvrir, puis 1,5 à 2 millions supplémentaires par an. EDF énergies était identifié comme le principal partenaire, à la hauteur de 4 millions d'euros. 50% du budget était acquis selon Jérôme Pensu dans cet article. Et la prévision était, déjà, de dégager 500 000 euros de bénéfices par an grâce à la partie du Biome ouverte au public.
Ces chiffres sont encore ceux présentés en 2014 dans le dossier de la 2e Commission des sites et en 2016 sur le site du Biome.

Le nombre de visiteurs prévus était évalué entre 2000 et 5000 par jour, selon Jérôme Pensu devant la commission municipale de Soustons précédant l'enquête publique. Dans le dossier de 2014, pour la 2e commission des sites, il est évalué à plus de 230 000 dès la première année. Dans ce dossier, un budget prévisionnel est présenté pour les 3 premières années de fonctionnement. 2014/15 devait être l'année 1. Ce sera, si le projet devient réalité, 2016/2017. L'autorisation d'ouverture accordée en octobre 2014 nécessite une ouverture dans un délai de trois ans, cela arrive vite.

Ci-après un extrait de ce budget prévisionnel, et le seuil de rentabilité qui y figure.

On peut lire aussi dans les comptes détaillés :
Année 1 : 450 000 euros seront versés à la Fondation d'entreprise, 100000 à Alca Torda, l'équilibre s'obtenant avec 303000 de subventions et dons
Année 2 : respectivement 500000, 103000, 303000
Année 3 : respectivement 600000, 106000, 303000
Pour Alcatorda, le versement est présenté comme un partenariat. Est-ce le loyer du terrain mis à disposition (bail emphytéotique) par la Fédération des chasseurs ? Il avait été annoncé dans Sud Ouest de septembre 2015 pour un montant annuel de 50000 euros.

La rentabilité est assurée par les entrées : 233108 la première année – le seuil de rentabilité étant 213116 – avec 10% d'augmentation chaque année.
Enfin, il était annoncé qu'en 2016, après deux ans de fonctionnement, le capital de la SAS sera porté de 37000 à 300000 euros

Une ouverture par étape ?

Dans la demande faite au Conseil régional en 2015, ce budget semble être remplacé par des prévisions plus réalistes d'une ouverture par étape. On peut télécharger ici la note de synthèse du Conseil régional.
Le budget de la première étape est passé à moins de 1,4 millions d'euros, dont 771000 d'autofinancement. Pour une SAS qui, à l'époque où la demande est faite, a mangé une grande partie des 37000 euros de son capital social, on peut se demander d'où vient cette somme. D'autant qu'aucune des subventions annoncées ne sont encore (en février 2016) des réalités.

Le site Le Biome fait comme si (actualités de novembre 2014) ces subventions avaient été décidées. Une manière de convaincre des sponsors, dont on trouve la liste sur le site.

Structures porteuses, structures connexes et circulations financières

On trouve ici les structures porteuses figurant dans le dossier de la commission des sites d'octobre 2014

ou sur le site du Biome.

La SAS Le Biome : voir plus haut la partie consacrée à la SAS. Jérôme Pensu est PDG et Enrique Petit secrétaire. Un conseil de surveillance est annoncé, sans plus de précision sur sa fonction et sa composition.

La Fondation d'entreprise : recevra l'intégralité des bénéfices de la SAS. Mais je n'ai pas encore trouvé trace de sa création dans le Journal Officiel, où elle devrait figurer aux côtés des associations et autres fondations.

Le Fonds de dotation Biome. Il a été créé en juillet 2014. Son bureau est ici. Jérôme Pensu est président, Enrique Petit secrétaire et Mickael Henry trésorier. Il est domicilié chez Jérôme Pensu.
Il recevra des dons, des droits, grâce surtout à l'activité de l'association Le Biome et aux projets « initiés, développés ou soutenus » par l'association, prioritairement pour la création de la station zootechnique

L'Association Le Biome a été créée en octobre 2015. Son président est Enrique Petit et son secrétaire général Jérôme Pensu. Son bureau est ici. Il n'y avait, lors de sa création, pas d'autres adhérents.
Elle s'occupera essentiellement du volet « mémorial de la biodiversité », dont les « entretiens scientifiques » (de Castets?). A ce sujet, on peut lire sur le site du Biome (évènements permanents) : « Ils seront aussi l'occasion de l'organisation de la levée de fonds spéciaux pour le financement des travaux scientifiques présentés ou en projet. L'organisation des entretiens scientifiques sera financée par Le biome. Les entretiens scientifiques donneront lieu à des actes dont la diffusion sera assurée en plusieurs langues, sur tout support accessible et dont les coûts seront assurés par Le biome". Dans 5 ans, elle comptera 1 500 000 adhérents, selon le site du Biome...

D'autres structures sont (ou seront) en connexion financière forte avec la galaxie du Biome. La structure porteuse de la maquette de la baleine, « un cadeau pour la terre ».

Et surtout, la Fédération des chasseurs des Landes, qui est en arrière plan du Biome. Par le centre Alca Torda de soins pour la faune sauvage, qui n'a, semble-t-il, pas d'existence autonome de la FDC40. Le centre Alca Torda est spécialisé dans les soins aux oiseaux mazoutés ou terrestres et des mammifères de moins de six kilos.
Le Biome est une extension d'Alca Torda, où sont employés Jérôme Pensu (directeur) et Enrique Petit, les deux se définissant professionnellement comme soigneurs animaliers. Alca Torda intervient pour l'accueil des animaux blessés sur l'autoroute A63 qui traverse les Landes, et, à ce titre le journal de l'entreprise concessionnaire, Atlandes, a publié un entretien avec Jérôme Pensu dès 2012. On peut télécharger cet entretien.
Le Biome sera situé sur un terrain appartenant à la FDC40. Laquelle a créé son propre fonds de dotation « Alca Torda biodiversité » le 28 mai 2014, quelques semaines avant la création du fonds de dotation Biome. Il est présidé par Jean-Roland Barrère, le président de la FDC40, et en est sous la stricte dépendance.
« Ce fonds de dotation a pour objet de développer et soutenir toute activité d'intérêt général dans le domaine de la protection de la nature et de l'environnement en vue, notamment, d'assurer la protection des espèces de la faune sauvage, des habitats de cette dernière, de la flore, des zones humides et, plus généralement de la biodiversité, y compris comme opérateur désintéressé des mesures de compensation ».
Le rôle (incontestable, mais controversé) de la FDC40 pour la biodiversité dans les Landes, où elle gère des zones humides, est une autre question, à reposer en fonction de son implication dans le Biome / baleine.

En conclusion : 11 raisons de ne pas mettre de l'argent public dans le projet Biome

La FDC40 peut développer un tel projet, qui au final ressort sans doute du « greenwashing », mais son intérêt réel ne justifie pas des subventions publiques, même simplement pour attirer des touristes.

Pour synthétiser ce qui ressort des trois billets que j'ai consacré à ce projet, on peut trouver, dans le désordre, 11 raisons de s'opposer au financement

1- Au-delà d'une communication et d'un style marketing, quelle est la pertinence réelle du Biome pour la sauvegarde de la biodiversité ?
2- La première étape, dont le financement est en discussion, est la création du parc animalier, avec la baleine comme produit d'appel pour le tourisme. Si le parc voit le jour, on peut être sceptique sur l'existence une seconde étape.
3- L'absurdité de mettre une maquette de baleine dans la forêt landaise pour sensibiliser à la biodiversité. Plus généralement, une pédagogie superficielle.
4- La fantaisie de présenter le parc animalier comme la reconstitution d'une foret équatoriale dans la forêt landaise.
5- La pertinence scientifiquement douteuse de préserver des espèces exotiques ex-situ, en dehors de leur milieu. Et, de manière concomitante, la faiblesse du conseil scientifique au regard des objectifs affichés.
6-Le nécolonialisme qui conduit à considérer les pays non-occidentaux comme incapables de protéger les espèces menacées sur leur territoire.
7- Le fossé entre l'emphase (« le plus grand », « le seul », « unique ») et le faible nombre d'espèces concernées.
8- L'opacité financière entre les structures porteuses, les structures connexes, les origines du financement, et une SAS dont la dimension financière est sans commune mesure avec le coût du projet.
9-La faiblesse du groupe porteur : 2 personnes. Ce qui conduit à se demander qui est réellement derrière.
10- La tendance à annoncer des décisions ou événements qui ne restent que des souhaits ou hypothèses, loin de la réalité.
11- le caractère lacunaire du site officiel, sensé présenter le projet. Très peu d'actualités, pas de détails, rien depuis le 15 décembre 2015 (ce billet est rédigé le 14 février). La page facebook est aussi silencieuse depuis le 7 janvier. Et si l'on enlève ce qui concerne la Baleine...